--- Tag: ["đź“ś", "🌞", "đź‘‘", "🇫🇷", "🇩🇪"] Date: 2022-12-09 DocType: "WebClipping" Hierarchy: TimeStamp: 2022-12-09 Link: https://blog.nationalmuseum.ch/fr/2022/12/madame-palatine-a-la-cour-du-roi-soleil/ location: CollapseMetaTable: true --- Parent:: [[@News|News]] Read:: [[2022-12-09]] ---   ```button name Save type command action Save current file id Save ``` ^button-MadamePalatinelacourduRoiSoleilNSave   # Madame Palatine Ă  la cour du Roi Soleil ![Elisabeth-Charlotte de Bavière – Liselotte pour sa famille et Madame Palatine pour les Français–, tableau de Jean-Gilbert Murat destinĂ© au château de Versailles, d’après une Ĺ“uvre originale de Pierre Mignard (extrait).](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/liselotte-von-der-pfalz-titel-300x225.jpg) **Elisabeth-Charlotte de Bavière – Liselotte pour sa famille et Madame Palatine pour les Français–, tableau de Jean-Gilbert Murat destinĂ© au château de Versailles, d’après une Ĺ“uvre originale de Pierre Mignard (extrait).** [© RMN-GP, Château de Versailles / HervĂ© Lewandowski](http://collections.chateauversailles.fr/#eb8dcfd1-6108-4fe5-bc63-73f56e67290b) L’incroyable correspondance de Liselotte de Bavière, au-delĂ  de son aspect autobiographique, offre une sorte de chronique de la cour française au temps de Louis XIV et de la RĂ©gence. Elle compte parmi les textes de langue allemande les plus cĂ©lèbres de l’époque baroque. «VoilĂ  un deuil pour toute l’Europe.» C’est ainsi que le juriste et chroniqueur parisien Mathieu Marais commenta la mort de cette princesse qui avait passĂ© 51 ans de sa vie Ă  la cour de France et qui, par sa correspondance surabondante, entretenait un remarquable rĂ©seau de relations Ă  travers toute l’Europe: Elisabeth-Charlotte de Bavière (1652-1722), surnommĂ©e Liselotte par sa famille et «La Palatine» par les Français, duchesse d’OrlĂ©ans, belle-sĹ“ur de Louis XIV et mère du rĂ©gent français Philippe II de Bourbon. Depuis ses divers cabinets d’écriture, elle expĂ©dia au moins 60 000 lettres (trois fois plus que Voltaire!) aux cours royales de Prusse, d’Angleterre, de Suède, du Danemark, d’Espagne et de Sicile, ainsi qu’à presque toutes les cours princières d’Allemagne et aux cours ducales de Lorraine, de Savoie et de Modène. ![Surplombant le Neckar, la ville et le château d’Heidelberg avant leur destruction. Peinture de Gerrit Berckheyde, vers 1670.](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/stadt-und-schloss-heidelberg-vor-der-zerstorung-300x185.jpg) **Surplombant le Neckar, la ville et le château d’Heidelberg avant leur destruction. Peinture de Gerrit Berckheyde, vers 1670.** MusĂ©e du Palatinat de la ville d’Heidelberg Liselotte de Bavière appartenait Ă  la haute noblesse du Saint Empire romain germanique. Petite-fille de FrĂ©dĂ©ric IV, le «roi d’un hiver», et d’Elisabeth Stuart d’Angleterre, elle Ă©tait l’unique fille issue du mariage du prince Ă©lecteur Charles-Louis Ier du Palatinat et de Charlotte de Hesse-Cassel. Elle se dĂ©crit elle-mĂŞme comme une enfant pareille Ă  «un joyeux tambour qui, tel une feuille, souffle inlassablement dans le vent». Elle aurait prĂ©fĂ©rĂ© naĂ®tre garçon, comme elle le rappelle Ă  multiples reprises: «Ma vie durant, j’ai regrettĂ© d’être du sexe fĂ©minin, et Ă  la vĂ©ritĂ©, j’aurais prĂ©fĂ©rĂ© ĂŞtre prince Ă©lecteur que Madame.» ![Davantage intĂ©ressĂ©e par les Ă©pĂ©es de bois de son frère que par les poupĂ©es: la petite Liselotte, ici âgĂ©e de 4 ou 5 ans.](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/die-kleine-liselotte-im-alter-von-vier-bis-funf-jahren-235x300.jpg) **Davantage intĂ©ressĂ©e par les Ă©pĂ©es de bois de son frère que par les poupĂ©es: la petite Liselotte, ici âgĂ©e de 4 ou 5 ans.** [Wikimedia](https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Engraving_of_Liselotte_of_the_Palatinate_as_an_infant_after_Vaillant.jpg) Le mariage des parents de Liselotte sombra rapidement. Après leur divorce (controversĂ© d’un point de vue juridique), son père Ă©pousa de façon morganatique Louise von Degenfeld, ancienne dame de compagnie de la mère de Liselotte. La petite fille de sept ans, accompagnĂ©e de sa gouvernante, fut alors confiĂ©e Ă  la sĹ“ur de Charles-Louis, Sophie de Hanovre, Ă  la cour des ducs de Brunswick-Lunebourg. Liselotte, affectĂ©e par les disputes incessantes de ses parents, passa lĂ -bas des annĂ©es tranquilles. «Mein herzlieb ma tante» Sophie, sa très chère tante, fut pour elle une sorte de mère de substitution et resta sa confidente la plus intime jusqu’à la fin de sa vie. Plus tard, les deux femmes s’écrivaient au moins une fois par semaine (les lettres de Liselotte faisant souvent plus de 20 pages!). En 1663, le prince Ă©lecteur la rapatria Ă  Heidelberg pour lui donner l’éducation jugĂ©e alors convenable pour une jeune fille: Ă©tude de la Bible, travaux d’aiguille, leçons de danse, cours d’épinette, sans oublier l’apprentissage de l’allemand et du français. CĂ´tĂ© loisirs, elle s’adonnait au volant, au billard et Ă  la lecture de livres d’Histoire et d’«éducation morale». Parmi ses treize demi-frères et sĹ“urs – dont un certain nombre mourut prĂ©maturĂ©ment – avec lesquels Liselotte s’entendait bien, elle demeura toute sa vie en correspondance avec les raugravines Louise et Amalie Elisabeth («Amelise»), ainsi qu’avec le raugrave Charles Louis («Karllutz») ![Portrait destinĂ© au marchĂ© matrimonial: Liselotte entre 1670 et 1671, peu de temps avant son mariage avec le duc Philippe Ier d’OrlĂ©ans.](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/die-ca-18-jahrige-liselotte-zwischen-1670-und-1671-255x300.jpg) **Portrait destinĂ© au marchĂ© matrimonial: Liselotte entre 1670 et 1671, peu de temps avant son mariage avec le duc Philippe Ier d’OrlĂ©ans.** [Wikimedia](https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Liselotte_von_der_Pfalz_1670_rem.jpg) ## De Heidel­berg à Versailles En 1671, Liselotte Ă©pousa le duc Philippe Ier d’OrlĂ©ans, petit frère de roi de France Louis XIV et veuf. Avec ce mariage politique, le père de Liselotte espĂ©rait protĂ©ger durablement son territoire des visĂ©es expansionnistes de la France – en vain, comme on le constaterait une dizaine d’annĂ©es plus tard. Liselotte se soumit Ă  son destin: «On m’a, entre nous soit dit, expĂ©diĂ©e lĂ  contre mon bon vouloir», Ă©crivit-elle plus tard depuis la France. Elle quitta son cher pays dans les larmes et s’en languit jusqu’à son dernier jour: «J’aimais mieux l’Allemagne et trouvais \[...\] bien plus agrĂ©ables son faste plus modeste et sa plus grande rectitude.» Elle tint toute sa vie en haute estime «nos bonnes manières allemandes», y compris dans le domaine culinaire: «j’aime mieux la choucroute et le chou vert» et «je prĂ©fèrerais boire de la bière chaude Ă  la noix de muscade plutĂ´t que du chocolat, du thĂ© et du cafĂ©.» Monsieur et Madame, comme leur rang exigeait qu’on les appelle, formaient un couple des plus mal assortis. Le frère du roi Ă©tait un homosexuel et un noceur notoire qui ne portait pas le moindre intĂ©rĂŞt Ă  Liselotte. Il menait une vie de sybarite dissolu et prĂ©fĂ©rait passer ses jours et ses nuits Ă  dĂ©penser des sommes colossales pour ses amants, ses protĂ©gĂ©s et ses jeux de cartes. La relation que Liselotte entretenait avec le roi, qu’elle rĂ©vĂ©rait, Ă©tait beaucoup plus intime et amicale. Tous deux partageaient les mĂŞmes passions. Aussi amateurs de théâtre et d’opĂ©ra l’un que l’autre, ils assistaient souvent ensemble Ă  des reprĂ©sentations. Ils allaient aussi frĂ©quemment Ă  la chasse, Ă  cheval ou en calèche. Liselotte nourrissait en effet pour ce passe-temps un enthousiasme qui persista jusqu’à un âge avancĂ©, en dĂ©pit de ses chutes, de ses blessures et de son embonpoint croissant: «Je suis peut-ĂŞtre grosse, mais cela ne m’empĂŞche pas de chasser; je monte de gros chevaux qui peuvent me supporter.» ![Liselotte en costume de chasse, dessin Ă  l’aquarelle de Joseph Werner, 1671.](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/liselotte-im-jagdkostum-1671-226x300.jpg) **Liselotte en costume de chasse, dessin Ă  l’aquarelle de Joseph Werner, 1671.** [Château de Versailles, Bridgeman Images). RMN / ©Christophe Fouin](http://collections.chateauversailles.fr/#418c79a8-05f1-4537-9e8e-7028810d7202) ## La vie à la cour de France Liselotte disposait de sa propre cour, d’environ 250 personnes, qui lui coĂ»tait autour de 250 000 livres par an. Elle vivait dans ses appartements du Palais Royal Ă  Paris ainsi qu’aux châteaux de Saint-Germain-en-Laye, Saint-Cloud, Versailles, Marly, Fontainebleau et Montargis. Mais elle et son Ă©poux devaient la plupart du temps rester Ă  la cour du roi afin de prendre part aux multiples festivitĂ©s, cĂ©rĂ©monies et autres distractions qui s’y dĂ©roulaient: «\[...\] quand nous rentrâmes de la chasse, nous nous changeâmes et nous rendĂ®mes aux jeux; nous y restâmes jusqu’à sept heures du soir; de lĂ , nous allâmes Ă  la comĂ©die, qui s’acheva Ă  dix heures et demie, puis nous allâmes dĂ®ner, et du dĂ®ner au bal.» Liselotte ne se reconnaissait guère dans l’étiquette et les mĹ“urs de la cour, pas plus que dans le gaspillage et le faste permanents qui y rĂ©gnaient. DĂ©penser des sommes extravagantes pour des articles de mode lui semblait vanitĂ© et «coquetterie». De sorte que lorsque sa «vieille zibeline», objet de railleries Ă  son arrivĂ©e en France, devint un accessoire en vogue lors de l’hiver 1676, particulièrement froid, elle goĂ»ta fort l’ironie de la situation: «\[...\] chacun s’en fait tailler une Ă  prĂ©sent \[...\] et c’est en ce moment la dernière mode», s’amusait-elle en parlant de son Ă©tole de fourrure plutĂ´t rudimentaire, rebaptisĂ©e «palatine» en son honneur. Liselotte garda la sienne jusqu’à ce qu’elle fĂ»t mangĂ©e par les mites. Mites qui, elles, atterrirent sous le microscope de la duchesse, dont l’esprit curieux s’intĂ©ressait Ă  toutes sortes de domaines scientifiques. ![Liselotte vers 1678/1679, entourĂ©e de ses enfants: Elisabeth Charlotte, qui devint duchesse de Lorraine (Ă  gauche), et le futur rĂ©gent Philippe II de Bourbon (Ă  droite).](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/liselotte-um-1678-1679-mit-ihren-kindern-220x300.jpg) **Liselotte vers 1678/1679, entourĂ©e de ses enfants: Elisabeth Charlotte, qui devint duchesse de Lorraine (Ă  gauche), et le futur rĂ©gent Philippe II de Bourbon (Ă  droite).** [© RMN-GP, Château de Versailles / HervĂ© Lewandowski](http://collections.chateauversailles.fr/#eb8dcfd1-6108-4fe5-bc63-73f56e67290b) ## «Être Madame est un bien triste mĂ©tier.» Monsieur donna Ă  Liselotte une fille et deux fils, dont l’aĂ®nĂ© mourut en bas âge. Puis, ayant rempli ses devoirs dynastiques, il se retira de la chambre conjugale. Cette sĂ©paration de corps n’affecta guère Liselotte qui n’avait «pas du tout aimĂ© la tâche de concevoir des enfants». Elle souffrit en revanche de l’attitude de son mari adopta après cela, faites de dĂ©sintĂ©rĂŞt ou de brimades. De fait, le duc, personnage très manipulable, Ă©tait Ă  toute heure entourĂ© d’une foule de favoris et de compagnons de jeu aux intentions parfois douteuses. Certains, par pure mĂ©chancetĂ©, rĂ©pandaient sur le compte de Liselotte des calomnies qui ne faisaient que compliquer une union dĂ©jĂ  difficile. Liselotte Ă©tait la proie des intrigues, le roi ne voulant pas jouer sans cesse les mĂ©diateurs et se refusant catĂ©goriquement Ă  prendre parti contre son frère. Liselotte se retira de plus en plus souvent dans ses appartements privĂ©s. «Être Madame est un bien triste mĂ©tier», se plaignait-elle. Elle en vint Ă  la conclusion que «\[son\] destin avait Ă©tĂ© ainsi prĂ©vu par Dieu: souffrir et se taire constamment, et enfouir en \[elle\] tout chagrin». Mais cette femme cordiale et pleine d’humour ne sombra pas pour autant dans la dĂ©pression: «On ne peut crier sans cesse, et cela ne sert Ă  rien; le rire conserve la santĂ©; chier et pĂ©ter, sauf votre respect, y aident aussi beaucoup.» AssoiffĂ©e de connaissances, elle se plongeait dans les livres de son immense bibliothèque, enrichissait ses prĂ©cieuses collections de pièces, de pierres prĂ©cieuses et de cachets, s’occupait de ses cockers, jouait de la guitare et par-dessus tout, s’adonnait Ă  sa plus grande passion: sa correspondance. «L’écriture m’amuse et offre une diversion Ă  mes tristes pensĂ©es.» ## Un style sans artifice ni fioriture Les lettres rĂ©digĂ©es par Liselotte rapportent avec force dĂ©tails des Ă©vĂ©nements vĂ©cus ou observĂ©s et mĂŞlent les scoops Ă  des scènes quotidiennes banales (en apparence). Ses prĂ©cisions utiles et ses anecdotes piquantes dessinent un tableau circonstanciĂ© de son Ă©poque et des coulisses de la cour de France et de son Ă©clat baroque. Ses phrases sont dĂ©pourvues de formule toute faite et de distance artificielle, ses formulations directes et sans fard, dans un style sans fioriture et ponctuĂ© d’avis critiques, quoique fortement subjectifs – et l’autodĂ©rision et le sarcasme ne sont jamais loin. DĂ©truisant elle-mĂŞme le courrier qu'elle recevait immĂ©diatement après rĂ©ception et rĂ©ponse, elle Ă©tait persuadĂ©e que ses lettres subiraient le mĂŞme sort. C’est forte de cette conviction que cette femme cultivĂ©e et spirituelle couchait ses pensĂ©es et opinions sur le papier, sans filtre ni ambition littĂ©raire: «\[...\] j’écris comme je parle; car je suis trop naturelle pour Ă©crire autrement que je pense.» Mais elle savait pertinemment que ses lettres Ă©taient systĂ©matiquement lues avant expĂ©dition. Elle fut d’ailleurs plusieurs fois rappelĂ©e Ă  l’ordre pour cela. Dans une de ses lettres, elle fait aux censeurs une farce des plus crues en racontant une «urgence intime» durant un voyage: «J’eus alors une Ă©norme urgence \[...\], on m’apporta un pot de chambre en terre. J’étais en pleine besogne quand le pot se brisa. \[...\] C’est une belle histoire, et bien digne d’être lue par un ministre d’état; j’aimerais savoir s’il va aussi la rapporter au roi, car les affaires du royaume iraient mal si le roi n’était pas mis au courant.» ![Lettre du 20 fĂ©vrier 1718, portant la signature de Liselotte von der Pfalz. La duchesse rĂ©digea un tiers de sa correspondance en français.](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/brief-liselotte-von-der-pfalz-236x300.jpg) **Lettre du 20 fĂ©vrier 1718, portant la signature de Liselotte von der Pfalz. La duchesse rĂ©digea un tiers de sa correspondance en français.** [Bibliothèque universitaire d’Heidelberg](https://doi.org/10.11588/diglit.4997#0058) ## En conflit avec son cher souverain L’indomptable Liselotte fut mise Ă  l’écart de la cour par la haine irrĂ©pressible qu’elle Ă©prouvait pour Madame de Maintenon. D’abord gouvernante des «bâtards royaux», les enfants nĂ©s de l’union de Louis XIV et de sa maĂ®tresse Madame de Montespan, Madame de Maintenon finit par supplanter cette dernière Ă  ce rĂ´le. Après la mort de la reine Marie-ThĂ©rèse en 1683, Louis XIV fit de cette «parvenue de basse extraction» son Ă©pouse morganatique. Liselotte, par nature pragmatique et libre d’esprit, mais aussi excessivement attachĂ©e au rang et au titre de noblesse, traitait cette femme influente qui accaparait complètement le roi de «crotte de souris» «égarĂ©e parmi les grains de poivre», de «sorcière» et de «vieille ripopĂ©e». Elle ne comprit absolument pas l’attitude du roi qui, dans ce contexte, se dĂ©tourna d’elle. Maus la plus grande humiliation pour elle qui Ă©prouvait le plus profond mĂ©pris pour les «mĂ©salliances», ces unions «inconvenantes» au sens propre du terme, survint en 1792, lorsque Louis XIV organisa le mariage de sa fille adultĂ©rine et du fils de Liselotte. Ă€ l’annonce de cette nouvelle, Liselotte gifla son fils en prĂ©sence de toute la cour. La relation entre le roi et sa belle-sĹ“ur fut une dernière fois Ă©branlĂ©e après le dĂ©cès du frère de Liselotte, Charles II, prince Ă©lecteur du Palatinat Ă  partir de 1680 et mort sans descendance. Louis XIV fit valoir son droit de succession au nom de sa belle-sĹ“ur, sans aucun fondement juridique. Ses prĂ©tentions aboutirent Ă  la guerre de la Succession palatine, de 1688 Ă  1697. Les troupes françaises en maraude envahirent le Palatinat, dĂ©vastant champs, villes et villages et dĂ©truisant le château d’Heidelberg: «Mon cĹ“ur saigne, et l’on m’en veut encore fortement de m’en attrister», se dĂ©sole Liselotte. ![Heidelberg durant la guerre de succession du Palatinat: page de garde d’un ouvrage anonyme paru en 1693 et relatant la destruction mĂ©thodique de la ville et du château par incendie et explosions (extrait).](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/heidelberg-im-pfalzischen-erbfolgekrieg-300x194.jpg) **Heidelberg durant la guerre de succession du Palatinat: page de garde d’un ouvrage anonyme paru en 1693 et relatant la destruction mĂ©thodique de la ville et du château par incendie et explosions (extrait).** [Bibliothèque universitaire d’Heidelberg](https://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglit/heydelberg1693/0003/image,info) ## De veuve à mère du RĂ©gent Monsieur mourut en 1701, laissant une montagne de dettes. Liselotte, devenue veuve, dĂ©pendait dĂ©sormais du bon vouloir et de l’argent de ce roi qu’elle n’avait jamais cessĂ© d’admirer. Mais pour se les assurer, elle dut d’abord ravaler son orgueil et se rĂ©concilier avec Madame de Maintenon – ce qu’elle fit avec succès. Le roi retrouva ses bonnes dispositions vis-Ă -vis de sa belle-sĹ“ur, tout en continuant Ă  la tenir Ă  distance entre les rĂ©ceptions officielles. Ce n’est que vers la fin de sa vie qu’il rendit sa confiance des dĂ©buts Ă  Liselotte, qui put Ă  nouveau accĂ©der librement aux appartements du roi, ce lieu qu’elle considĂ©rait comme «le Saint des Saints». ![Au centre et Ă  droite du roi: Liselotte lors de la rĂ©ception du prince Ă©lecteur FrĂ©dĂ©ric August, futur roi Auguste III de Pologne, le 27 septembre 1714. Peinture de Louis de Silvestre.](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/liselotte-und-louis-xiv-300x239.jpg) **Au centre et Ă  droite du roi: Liselotte lors de la rĂ©ception du prince Ă©lecteur FrĂ©dĂ©ric August, futur roi Auguste III de Pologne, le 27 septembre 1714. Peinture de Louis de Silvestre.** [© Gemäldegalerie Alte Meister, MusĂ©e d’art des collections nationales de Dresde](https://skd-online-collection.skd.museum/Details/Index/185700) Une question brĂ»lante, cependant, alimentait toutes les conversations: l’incertitude qui pesait sur la succession du roi, et qui ne cessait de se renouveler. Ce fut d’abord en 1711 la mort du «Grand Dauphin», seul enfant lĂ©gitime du roi Ă  avoir atteint l’âge adulte. Son fils, le «Petit Dauphin», le suivit moins d’un an plus tard, lui-mĂŞme vite rejoint par son fils aĂ®nĂ©. Lorsque Louis XIV rendit l’âme Ă  son tour, en 1715, le trĂ´ne revint Ă  son arrière-petit-fils âgĂ© de 5 ans. Il allait devenir le roi Louis XV, mais n’ayant pas atteint sa majoritĂ©, il fut assistĂ© par le fils de Liselotte. C’est cette gouvernance assurĂ©e par Philippe II de Bourbon jusqu’en 1723 que l’Histoire a retenue sous le nom de RĂ©gence. ## Mort et postĂ©ritĂ© Liselotte demeura jusqu’à sa mort la mère du RĂ©gent et la «première dame» de la cour. Dans son grand âge, elle entretenait de bons rapports avec son fils et avec retrouvĂ© la considĂ©ration de la cour. Mais ce furent dĂ©sormais la maladie et les infirmitĂ©s qui la tourmentèrent. Par ordre de Louis XIV, la cour de Versailles fut dissoute jusqu’à la majoritĂ© du nouveau et Liselotte passa dès lors beaucoup de temps au château de Saint-Cloud. C’est lĂ  qu’elle mourut le 8 dĂ©cembre 1722, Ă  l’âge de 70 ans. ![La rĂ©sidence prĂ©fĂ©rĂ©e de la duchesse: possession de Monsieur, le château de Saint-Cloud, près de Paris, revint Ă  la mort de celui-ci au fils de Liselotte. Peinture d’Étienne Allegrain (extrait).](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/das-von-monsieur-erbaute-schloss-saint-cloud-bei-paris-300x174.jpg) **La rĂ©sidence prĂ©fĂ©rĂ©e de la duchesse: possession de Monsieur, le château de Saint-Cloud, près de Paris, revint Ă  la mort de celui-ci au fils de Liselotte. Peinture d’Étienne Allegrain (extrait).** [Wikimedia](https://commons.wikimedia.org/wiki/File:View_of_the_estate_of_Saint_Cloud_by_%C3%89tienne_Allegrain.jpg) L’extraordinaire correspondance de Liselotte, reflet de sa personnalitĂ© chatoyante, lui assure aujourd’hui une forme d’immortalitĂ©. Souvent citĂ©es, ses lettres constituent un prĂ©cieux recueil de sources pour l’histoire de la culture et des mentalitĂ©s, par les aspects autobiographiques qu’elles comportent, mais aussi par la vision qu’elles proposent, Ă  la manière d’une chronique, de la cour de France au temps de Louis XIV et de la RĂ©gence. Seuls 10% de ses lettres nous sont parvenues, ce qui constitue nĂ©anmoins un fonds considĂ©rable et foisonnant. Pourtant, Ă  ce jour, elles n’ont malheureusement fait l’objet que d’éditions parcellaires, remaniĂ©es en outre de façon disparate, voire franchement modifiĂ©es (d’oĂą les disparitĂ©s de langue des citations utilisĂ©es dans ce texte, issues de diverses publications). Trois cents ans après sa mort, on attend toujours une Ă©dition intĂ©grale et unifiĂ©e. Étonnant si l’on songe que la correspondance de Liselotte compte parmi les Ĺ“uvres de langue allemande les plus cĂ©lèbres de l’époque baroque... ![L’exubĂ©rance baroque sous la mantille de veuve: Liselotte porte un manteau de velours doublĂ© d’hermine et parsemĂ© de la fleur de lys des Bourbons, symbole de son appartenance Ă  la famille royale. Tableau de Hyacinthe Rigaud, vers 1713.](https://blog.nationalmuseum.ch/app/uploads/liselotte-portrat-von-hyacinthe-rigaud-255x300.jpg) **L’exubĂ©rance baroque sous la mantille de veuve: Liselotte porte un manteau de velours doublĂ© d’hermine et parsemĂ© de la fleur de lys des Bourbons, symbole de son appartenance Ă  la famille royale. Tableau de Hyacinthe Rigaud, vers 1713.** [© RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Jean Popovitch](https://www.photo.rmn.fr/archive/89-000881-2C6NU0HZAB2M.html) ## Baroque. Époque de contrastes Le baroque est une Ă©poque de contrastes: opulence et innovation d’un cĂ´tĂ©, mort et crises de l’autre. Cette exposition prĂ©sente des objets prĂ©cieux de l’architecture, de la culture des jardins, de la mode et de l’art, en se concentrant sur leur contexte historique pour rĂ©vĂ©ler la crĂ©ativitĂ© de cette Ă©poque dans toute son ambivalence.     --- `$= dv.el('center', 'Source: ' + dv.current().Link + ', ' + dv.current().Date.toLocaleString("fr-FR"))`